Apple Watch : Pourquoi ses limites structurelles peuvent ruiner votre expérience

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Vous partez de nuit, frontale vissée sous la casquette, premier col à l’aube, second à l’heure du café. Au poignet, une Apple Watch Ultra 2 flambant neuve: boîtier titane, lunette saphir, capteur cardio optique de dernière génération, boussole et altimètre barométrique toujours actifs. Les premiers kilomètres déroulent, GPS précis en L1 + L5 (dual-band), allure instantanée lisible sur l’écran OLED ultra-lumineux. Et puis l’ombre derrière l’épaule: l’autonomie GPS. Après 8, 10, 12 heures selon le mode économie d’énergie, la montre vous rappelle que la montagne longue – ultra trail, course nature engagée, fast hiking de deux jours – n’est pas son terrain natif. Ce test-découverte n’est pas un procès, mais un constat: l’Apple Watch excelle au quotidien et dans le trail court à soutenu; au-delà, des limites structurelles s’invitent.

Autonomie et GNSS en montagne: Le nerf de la guerre

En continu dual-band, l’Apple Watch Ultra 2 tient correctement une grosse sortie, mais peine à dépasser une nuit/jour de course avec navigation. Le « Workout Low Power Mode » réduit la fréquence de l’échantillonnage GPS et du capteur cardio optique pour grappiller des heures, au prix d’un track smoothing plus prononcé et d’une allure au km moins stable. Là où une montre de trail dédiée propose un mode UltraTrac, un mode expédition ou un battery manager détaillé (profil GNSS, enregistrement 1s/Smart, capteurs on/off), l’Apple Watch ne propose que des bascules globales. En pratique, cela se traduit par une estimation d’autonomie peu prédictible dès que vous activez suivi d’itinéraire, musique intégrée (Spotify offline ou Apple Music), notifications smartphone et métriques de performance.

  • GPS dual-band précis, mais consommation accrue en forêt et couloirs encaissés
  • Pas de vrai mode UltraTrac ni de battery manager granulaire
  • Charge rapide utile, mais recharge en course peu pratique avec le puck magnétique
  • Pas de Multi-GNSS réglable (GLONASS, Galileo, BeiDou, QZSS) ni de correction SBAS exposée à l’utilisateur
  • Satellite preload non maîtrisable; démarrage parfois plus lent hors réseau

Sur une traversée de 20 à 30 heures avec suivi d’itinéraire et enregistrement 1 s, une montre dédiée exploitant GNSS multibande configurable et écran transflectif économise chaque milliampère. L’écran OLED de l’Apple Watch, sublime en ville, coûte cher en montagne dès qu’il reste souvent allumé. Oui, le tactile est verrouillable (tactile verrouillable) et l’Action Button aide avec gants fins; mais l’écosystème Apple n’offre pas (encore) un mode expédition ou une vraie gestion capteur par capteur. Emporter une powerbank et faire une charge éclair lors d’une pause? Possible, mais la station de charge magnétique n’est pas un clip de charge: il faut manipuler le bracelet silicone, maintenir le contact, éviter la pluie… Sur une crête ventée, ce n’est pas idéal.

Navigation et sécurité: Ce que l’on gagne et ce qu’il manque

Côté sécurité, l’Apple Watch coche de bonnes cases: boussole précise, Backtrack dans l’app Boussole (retour au point de départ), sirène sur Ultra, détection de chute, étanchéité 10ATM sur Ultra (5ATM sur Series), mises à jour OTA régulières. Pour la navigation, tout repose sur les apps: WorkOutDoors, Komoot, Footpath ou Strava gèrent très bien l’import GPX, le suivi d’itinéraire, la navigation turn-by-turn et la cartographie offline avec zoom cartographique. Certaines affichent profil d’altitude, pente instantanée et dénivelé positif/négatif restants. Mais nativement, pas de carte topo complète avec points d’intérêt routables, pas de heatmaps communautaires, pas de segments live intégrés façon montre de trail, et le TracBack avancé reste l’apanage des spécialistes outdoor. En clair, on peut faire presque tout… si l’on sait choisir et configurer la bonne app, et si l’autonomie suit.

À noter :

Backtrack fonctionne sans iPhone, mais la cartographie détaillée dépend des apps tierces. Avant un ultra trail ou un raid de montagne, testez l’import GPX, la navigation turn-by-turn et la cartographie offline hors réseau. Vérifiez l’étanchéité (10ATM sur Ultra) et verrouillez l’écran pour éviter les appuis fantômes sous la pluie.

Capteurs, métriques et écosystème: Le détail qui compte

Sur les capteurs, l’Apple Watch aligne un accéléromètre, un gyroscope, un podomètre, un altimètre barométrique et un oxymètre (SpO2) selon régions, plus un thermomètre cutané dédié aux tendances (température corporelle de nuit) et HRV nocturne. Le capteur cardio optique est excellent à allure régulière, moins à VAM élevée et dans le froid; une ceinture cardio Bluetooth reste recommandée (Apple ne gère pas l’ANT+ pour les capteurs, uniquement Bluetooth et Wi‑Fi). Stryd, footpod et capteur de cadence se connectent via apps, mais l’intégration n’est pas aussi native qu’une montre de trail qui agrège puissance en course (running power), temps de contact au sol, oscillation verticale et running dynamics directement dans le fichier FIT. Côté métriques, Apple calcule l’allure instantanée, l’allure moyenne, l’allure au km, la cadence et offre VO2max estimée; watchOS 11 introduit une forme de training load via RPE, mais on reste loin d’un training effect aérobie/anaérobie, d’une récupération recommandée, d’un score de récupération ou d’une stamina façon montre outdoor. Ni body battery, ni seuil lactique guidé, ni performance condition native. La vitesse verticale et la VAM s’observent via apps, tout comme le GAP en trail. Pour l’export, la synchronisation avec Strava, TrainingPeaks et les fichiers FIT/GPX passe par des passerelles applicatives: ça marche, mais moins direct que Garmin Connect, Suunto App ou Coros App. En échange, vous gagnez la meilleure montre « à vivre »: Apple Pay, musique intégrée, Spotify offline, notifications smartphone propres, et un boîtier titane/lunette saphir très rassurants avec protection d’écran possible. Pour la montagne longue, il manque surtout la granularité: pas de battery manager fin, pas de profils GNSS multibande ajustables, pas de mode économie d’énergie orienté navigation continue. On peut bricoler, pas « profiler ».

  • Préparez des profils d’effort sobres: luminosité manuelle, sons/vibrations minimalistes, pas d’écran « always-on » en continu
  • Couplez une ceinture cardio Bluetooth pour fiabiliser la FC et économiser le capteur cardio optique
  • Utilisez une app dédiée (WorkOutDoors/Komoot) pour import GPX, profil d’altitude et cartographie offline
  • Anticipez une powerbank légère et un câble de charge rapide; testez la recharge en conditions
  • Verrouillez le tactile; mappez l’Action Button pour les tours et waypoints

Au final, l’Apple Watch – surtout en version Ultra avec boîtier titane, lunette saphir et étanchéité 10ATM – fait une excellente montre GPS de trail pour 4 à 12 heures, avec une précision GNSS dual-band remarquable en forêt et dans les vallons. Pour la montagne longue, ses limites structurelles demeurent: autonomie GPS perfectible, absence de battery manager digne d’une montre de trail, navigation topo native incomplète et écosystème de capteurs centré sur Bluetooth sans ANT+. Si vous êtes prêt à piloter finement vos apps, à accepter une logistique de recharge et à sacrifier quelques métriques avancées (ClimbPro, TracBack avancé, running dynamics), elle vous emmènera loin. Sinon, pour l’ultra trail ou le skyrunning de deux jours, une montre de trail dédiée – écran transflectif, Multi-GNSS, mode expédition, battery manager – reste aujourd’hui le choix le plus serein.

Nicolas Le Traileur

Nicolas Le Traileur

Nicolas Le Traileur est pratiquant régulier de trail et de course en nature. Il teste montres GPS, capteurs et équipements en conditions réelles, sur sentiers, en montagne et en sorties longues, avec une approche pragmatique centrée sur l’autonomie, la fiabilité et l’analyse des données. Son objectif : aider les coureurs à choisir des outils adaptés à leur pratique, sans marketing inutile, à partir d’un usage concret et mesuré.

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